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Textes inédits issus du catalogue 30 ans


Bibliothèque écossaise
dirigée par Keith Dixon


La Bibliothèque écossaise est née d’un constat, d’une ambition et d’une rencontre. Le constat était qu’à l’aube du XXIe siècle, la littérature écossaise n’existait toujours pas dans l’imaginaire littéraire des Français. Certes, on connaissait quelques-uns des grands noms de cette littérature – Walter Scott, Robert Louis Stevenson, Conan Doyle, par exemple –, mais au mieux ils étaient vaguement attachés à une nébuleuse tradition anglo-saxonne qui cachait plus qu’elle ne faisait voir. L’ambition était donc de faire vivre cette littérature en traduction française, non pas par nationalisme écossais ou par goût pour le kitsch celtique, mais parce qu’elle manquait à la compréhension de la production culturelle d’outre-Manche, parce que la voix écossaise méritait largement sa place dans la polyphonie littéraire britannique entendue à l’étranger.

La rencontre avec AMM a permis de faire ensemble ce constat et de faire éclore cette ambition. Dès 1995 nous nous sommes mis d’accord, le directeur de collection que je suis et AMM, sur une liste de romans écossais modernes et contemporains de pre mier rang jusque-là totalement inconnus du public français. Notre projet était à la fois de constituer une bibliothèque de classiques modernes écrits en Écosse et de suivre la production romanesque contemporaine au fil du temps avec une prédilection pour des textes novateurs sur le plan du contenu et/ou de la forme. Ainsi, les lecteurs français ont pu découvrir la grande trilogie de Lewis Grassic Gibbon, écrite dans les années 30 et marquant un tournant dans l’histoire du roman britannique, ou le roman Young Adam, d’Alexander Trocchi, romancier et aventurier héroïnomane qui a fait scandale dans la Grande-Bretagne du début des années 60. C’est ainsi que des écrivains de Glasgow, comme Alasdair Gray, Louise Welsh ou James Kelman, ont pu se constituer un lectorat français, tout comme – plus récemment – le poète devenu romancier, John Burnside, dont l’univers romanesque est irrigué par une violence sourde.
L’Écosse est un petit pays – à peine plus de cinq millions d’habitants – mais sa littérature est foisonnante, surtout depuis les années 60 où la contestation de l’Union britannique a pris la forme d’un mouvement national et populaire, aboutissant aujourd’hui au statut d’autonomie. Nous avons fait le choix de la diversité, rappelant ainsi que l’identité culturelle de l’Écosse n’a rien de singulier. Nos auteurs écossais sont nés ou résident en Écosse, mais leur provenance culturelle est multiple : notre famille littéraire écossaise est large et inclusive. Suhayl Saadi, auteur de Psychoraag, est d’origine pakistano-afghane et, comme ses personnages, il est au carrefour de plusieurs cultures, de l’Occident et de l’Orient ; Alexander Trocchi est né dans une famille d’Italiens de Glasgow et ses romans apportent une touche de sensualité souvent manquant au roman écossais ; Dominic Cooper, dont les romans explorent les vies rudes de la côte ouest écossaise, entre mer et terre ingrate, est né en Angleterre ; James Meek préfère les terres lointaines, la Russie post-révolutionnaire, par exemple, dans Un acte d’amour, et en ce faisant il s’inscrit dans une autre tradition écossaise, celle de la découverte de l’étrange et de l’étranger, une tradition dont se sont nourris Stevenson et James Hogg avant lui. Mais une fois le texte trouvé, le travail du directeur de collection est loin d’être fini : établir le contact avec l’auteur pour mieux le comprendre et ainsi mieux cerner son œuvre, présenter le texte au futur traducteur et accompagner la traduction, surtout lorsqu’elle bute sur les spécificités de la langue ou de la culture écossaises. Certains auteurs ou certains textes posent de ce point de vue plus de défis que d’autres : trouver le ton juste pour traduire l’invective populaire dans un roman de Kelman, comprendre et traduire l’ironie subtile et les allusions culturelles foisonnantes dans l’œuvre de Gray nécessitent une vraie collaboration entre le traducteur et le passeur qu’est le directeur de collection. Passeur aussi dans le sens où, pour réussir une collection de littérature étrangère, il faut être prêt à passer d’une culture à une autre, à solliciter des collaborations et des soutiens dans le pays d’origine des textes et à susciter de l’intérêt dans le pays d’arrivée.
L’Écosse contemporaine de ce point de vue est un terrain d’expérimentation passionnante et il ne manque pas d’aides et de soutiens à ceux et celles qui participent à la diffusion de sa culture. Mais la France est aussi un grand pays d’accueil de littératures d’ailleurs, ce qui, dans notre cas, a facilité la promotion d’une littérature « émergente ».”





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